Des affreux gremlins tentent de tuer une mère de famille, durant les fêtes, en se planquant dans un sapin de Noël, à l’affût et tenaces tel le plus pro des boogeymen. Joe Dante fait de son Gremlins un sommet de fun bien corrosif pour têtes blondes en manque de destruction massive…lors d’une séance, un jeune spectateur se serait vu condamner son moment d’entertainement par une mère outrée, pressée de le protéger de ces monstruosités. Le spectateur se serait planqué entre deux sièges durant tout le reste du film, pour échapper à la protection maternelle et assister au reste de ce spectacle « dantesque »…
Un gosse qui, comme Haley Joel Osment, voit des morts tout le temps, tente de récupérer un livre dans une vieille baraque peu rassurante. Seul souci : le bouquin est coincé entre les quenottes…d’un macchabée. Lequel se prendra à de multiples reprises une table en pleine poire…avant d’étouffer le pauvre petit de son poids de cadavre, langue visqueuse déroulée en sus.
Ce n’est pas du Joe Dante cette fois-ci, mais de la prod Laika, dirigée par deux passionnés, Sam Fell et Chris Butler. Et, enfin, comme le souhaiterait le Henry Selick de L’étrange Noel de Mr Jack, l’horreur et le glauque redeviennent « enfantins », le temps d’un film d’animation qui est une petite boutique des horreurs à la rythmique très Monster House.
Y’a-t-il un plaisir similaire à celui d’assister, plongé dans une salle obscure, à l’étonnement des parents (pour ne pas dire le désenchantement, le visage pâle) et au sourire sadique de leur bambin face à l’affreux, au laid, au trash ? Les têtes blondes adorent Gizmo mais ils sont d’autant plus attachés aux cruautés malsaines de ses dérivés malfaisants, créant l’Apocalypse.
Savourer un bon vieux moment d’horrifique pour kids en salles, c’est une audace qui, de nos jours ne se refuse pas, entre un Pixar plutôt décevant (malgré son méchant ours au design génial) et un Lorax…hum…dont le doublage français est garanti par Kev Adams…passons.
Ce qu’il a d’admirable avec un projet comme Paranorman c’est sa richesse de tous points de vue et son inventivité, qui est celle d’une bande d’ados cinéphiles déversant leur altruisme en un paquet de détails graphiques, de délires formalistes, de références que seuls les plus « adultes » comprendront, d’idées comiques et macabres.
Adolescents, parce qu’il faut conserver une belle âme potache pour mixer sexe (oui, un gosse qui se paluche presque devant une vidéo de gym, et ce dans un dessin animé pour gosses, ça existe !), violence et incorrections en tout genre, et ce dans la bonne humeur générale…bonne humeur, vraiment ?
C’est là l’autre défi du film : partir sur de l’amusement, dans un cadre cartoon bien irrespectueux par moments, où l’un des persos principaux est un délinquant craignant plus les adultes que les zombies…sans oublier de conserver ce petit quelque chose de grave, soit l’exploitation incessante de cette thématique qu’est la mort (et comment y réagir, comment la percevoir, comment l’accepter) …si la dimension joviale du film rappelle autant les bons Simpson Horror Show que les cadres d’un Sam Raimi, le discours pour le moins sombre, caractéristique de tous les contes (qui généralement ne finissent pas très bien, ni ne commencent très bien), ajoute véritablement quelque chose de pimenté à ce bel ouvrage d’animateurs chargés de ressusciter la sève du meilleur de Tim Burton. Un cinéaste qui jadis aimait lui aussi se plonger, coupé du monde extérieur (et des ADULTES, ces tarés !), dans ses déviances filmiques préférées (si possible avec Vincent Price), les murs de sa chambre d’enfant certainement tapissés façon Norman, comme une célébration permanente d’Halloween et de ses revenants.
En parlant d’Halloween, je vous laisse deviner la sonnerie de portable de Norman… et, si après cela la générosité du film ne vous frappe pas à la tête !
Voici donc un vrai film d’enfants: cool, fun, volontiers destroy et dépressif. La chair de poule.
Clément ARBRUN